Lors de la chute
du mur de Berlin, certains politologues annoncèrent la fin de l'histoire.
La démocratie allait conquérir le monde et à sa suite le libre échange.
Les conflits passeraient aux oubliettes ou plutôt le droit les régulerait.
Ces prédictions se sont révélées fausses. Depuis 90, nous assistons à une
montée des nationalismes, au développement des conflits issus de cette surenchère.
Dans
le cadre de nos actions de formation européenne, nous nous devons de réfléchir
à cette situation.
La
guerre en ex-Yougoslavie nous contraint à reprendre à nouveaux frais notre
réflexion sur la démocratie et la guerre. Quelque chose de nouveau est apparu
sur notre continent, " la guerre ethnique comme arme
suprême du pouvoir ". La paix n'est pas issue de l'effondrement
du bloc soviétique mais on s'en tire à bon compte en invoquant la complexité des Balkans et le poids du
front slavo-orthodoxe.
Ce
qu'il faudrait avant tout analyser, ce sont les mécanismes du pouvoir de
Milosevic. Des outils existent, voir par exemple l'excellent documentaire
produit par la BBC : Yougoslavie, suicide
d'une nation. On voit bien comment, entre autre Milosevic, ont utilisés
des procédés staliniens pour éliminer les adversaires. La déstabilisation
violente devient un mode de gouvernement, le politique instrumentalise l'ethnique.
Le type d'état de Milosevic n'est peut-être pas la résurgence
de l'éternel conflit balkanique mais plutôt « le prototype d'un pouvoir
inédit qui a appris à politiser l'identitaire pour se maintenir ».
La
crise du Kosovo est un défi pour toutes les démocraties. Elle n'est pas
une conséquence horrible de la guerre comme cela a été défini à Nuremberg,
mais un crime autonome. La purification
ethnique s'est engagée avant les frappes et suit un plan d'action
bien défini. Elle est la finalité d'une décision politique. Cette crise
nous interroge aussi sur là notion de culture. Existe-t-il une culture pure
d'un point de vue ethnique ? Il faudra redire avec force et peut-être courage
qu'elle participe de l'universel et que toute culture est constituée d'interactions
millénaires.
Le
communisme semblait définitivement moribond, son analyse ne concernait plus
que les historiens. Des concepts nouveaux doivent être analysés tels que
« national communisme » « communisme racial », en perspective avec ceux d'antan
" le peuple un ",
le mépris de l'économique, le culte du passé. Souvenons-nous de ce
qui s'est passé au Cambodge. Dans
ce pays, les Khmers rouges ont articulé hiérarchie raciale et idéologie.
La première catégorie des déportés était regroupée sur une base idéologique,
gens des villes, l'autre concernait les minorités ethniques, chinois, musulmans.
Enfin,
cette crise nous interpelle aussi sur nos relations avec l'autre Europe.
Souvenons-nous de la richesse culturelle de nos relations avec les pays
de l'Est. Le ralliement de l’Europe centrale aux démocraties s'est fait
sous l'égide des États-Unis par le biais de l'OTAN. L’idée
européenne s'est restreinte, le champ économique occupe le devant de la
scène et nos voisins se sentent quelque peu oubliés. De plus, à ma connaissance,
il n'y a pas encore eu de débat avec ces pays sur la question de la Yougoslavie.
Par
ces quelques réflexions, je souhaitais avant tout vous faire partager ma
perplexité, sortir autant que possible des clichés. La compassion n'est
pas suffisante pour comprendre cette crise. En outre, ce conflit pose, comme
cela. a été dit en entrée, des questions sur la démocratie telles que: Le
politique comme prise de décision et le conflit.
Ces
notes ont été alimentées par la dernière
livraison de la revue "Esprit"
qui consacre une large part de son numéro de mai 1999 à la crise des
Balkans.